Voici un mot de la langue française qui, comme bien d’autres, peut contenir plusieurs significations.
Au sens propre, quand un prisonnier se fait la malle en profitant d’une opportunité, c’est une évasion. Si un oiseau en cage remarque que la porte est ouverte, il s’évade en s’envolant. Au sens figuré, on entend souvent les phrases, j’ai besoin d’évasion, ce voyage m’a permis de m’évader, j’ai pu m’évader un moment en voyant ceci ou en écoutant cela.
Si un détenu s’évade, c’est qu’il est emprisonné. Donc, si une personne libre de sa vie s’évade, on peut aussi partir de l’idée qu’elle estime se trouver dans une forme de prison et c’est malheureusement une réalité pour beaucoup. Le mot prison contient également plusieurs sens, celle qui retient le corps physique avec les barreaux ou parfois une maladie, un handicap. Mais aussi le sens d’une prison plus insidieuse, celle de l’habitude, du (faux) confort, de la paresse, du « je suis bien là où je suis, pourquoi vouloir autre choses ».
Malheureusement une vie vécue dans l’optique d’éviter qu’elle soit trop déplaisante oblige à faire, faire encore et encore moult effort pour trouver à l’extérieur les conditions pour la rendre plus agréable à l’intérieur.
Il est donc légitime de vouloir s’évader si à l’intérieur de soi, on n’a pas trouvé ce qui donne sens à une vie et pouvoir s’échapper de temps en temps réduit la pression, les tâches à faire trop difficiles, la monotonie, la routine et l’ennui.
Pour adoucir un système basé presque uniquement sur l’économie de marché, la performance et l’effort continuel, le marketing des loisirs a été créé par une société qui suffoque sous le joug d’un schéma de pensée un peu trop uniforme.
Chercher l’évasion, c’est vouloir la liberté. Mais qui peut prétendre être réellement libre si l’on tient compte des obligations sociétales, familiales, du travail et autres de toutes sortes ? Donc, en partant de cela, il devient évident que la recherche de la liberté doit être avant tout le fruit d’un état d’esprit. Peut-être celui de voir et de faire les choses avec un certain détachement, un peu comme un jeu continuel, sans chercher absolument le résultat, mais en se disant que chacun fait ici-bas ce qu’il peut avec ce qu’il possède. Et qu’un état d’esprit mental en paix et joyeux sera mille fois plus efficace qu’une soif, toujours inassouvie, de rechercher à… s’évader d’une façon matérielle et artificielle.
Est-ce que le véritable voyage ne consisterait pas plutôt à revenir à l’intérieur, se sentir bien en soi, et être satisfait sans avoir besoin constamment des feux d’artifice qui après avoir été lancés et admirés un court instant explosent et disparaissent ?
Dans cette approche, le bonheur qui est fait d’une multitude de petites choses aura toute sa signification et l’évasion trouvera un sens, non pas celui de fuir une prison, même toute dorée qu’elle soit, mais juste pour le plaisir de se sentir bien. À ce moment, il deviendra possible d’oser se lancer dans l’inconnu non pas pour s’évader mais plutôt pour le plaisir de jouer. Tenter quelque chose de différent et si le résultat n’est pas à la hauteur, recommencer encore et encore car essayer, c’est finir par y arriver. Toutes les personnes qui ont réalisé une belle chose, si petite soit-elle, seront d’accord avec ce point. Etienne
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Commentaires
Très beau texte et très juste. Merci pour le partage 😊